Réveil au milieu d'un étrange endroit.

C'était l'aube. Le ciel se teintait petit à petit d'une multitude de couleurs, passant du rose à l'orangé. Le soleil commençait à pointer le bout de son nez par delà les montagnes, éclipsant la nuit et toutes ses étoiles. Aujourd'hui était un nouveau jour, et pour sûr, il serait plein de surprises.
Surtout pour notre chère protagoniste, Cosima, qui pour l'instant dormait profondément dans le creux d'une éminence rocheuse. Sa respiration se faisait paisible, et l'on pouvait apercevoir ses pattes donner de légers coups dans l'air. Visiblement elle rêvait. Mais ce temps de paix ne fut pas long. Réveillée par une rafale de vent froid, la louvarde ouvrit un œil endormi, avant de bailler à s'en décrocher la mâchoire. Un long frisson parcouru son échine. Elle ne se souvenait pas d'avoir eu si froid en s'endormant, elle avait même trouvé un abri confortable pour la nuit ... Finalement, elle se décida à relever la tête, pour voir de quoi il retournait. Et quel ne fut pas son étonnement en constatant qu'elle gisait sur de la roche froide et non plus posée dans un nid de mousse. « Qu'est ce qu'il se passe encore... » pensa-t-elle, commençant à s'affoler. Relevant la truffe, elle se mit à chercher une odeur familière. Mais rien. « Oh mon dieu ... » Le rythme de son cœur s'accéléra d'un coup, et par réflexe, elle se mit à chercher sa famille du regard. Avant de se souvenir qu'elle s'était enfuie. La poisse ! Maintenant elle se retrouvait toute seule en milieu inconnu. Toute seule ? D'un côté elle l'espérait, pour ne pas risquer d'être sur un territoire ennemi. Mais d'un autre, elle aurait bien aimé un peu d'aide... Cosima se mit donc à appeler.

«  Y'a quelqu'un ? » couina-t-elle d'une voix rendue aigüe par la peur.

Sa voix résonna sur la montagne, se répercutant sur la paroi rocheuse avant de se perdre dans le grand nord. Elle plaqua ses oreilles contre son crâne, pas trop sûre de ce qu'elle devait faire. Elle se releva tout de même et chassa les quelques flocons qui s'étaient pris dans sa fourrure immaculée. Le Col de l'Ulfric s'offrait en spectacle devant elle, immense étendue neigeuse coincée entre deux pics gigantesques. Cosima se sentit toute petite. Et apeurée.

Dragan trottinait dans la neige éternelle du col. C'était un endroit en hauteur et plutôt synonyme de solitude. Le temps y était souvent venteux, quelques mouflons passaient.

Le mâle nouvellement Alpha essayait de faire ses armes tout seul... Et entendit une voix. Étonné, il se dirigea vers le bruit. C'était un genre d'appel alarmé et Dragan était un peu inquiet, d'un coup. Il n'avait pas pu entendre ce qui était dit, juste un bruit.

S'approchant à l'oreille, il vit un loup. Il ne bougeait pas, apparemment, il avait juste l'air d'observer les environs, l'expression intimidée ou soumise. En tout cas, les oreilles plaquées. Le mâle pointa les siennes tandis qu'il trottinait à sa rencontre. Car il était sûr de ne l'avoir jamais vu.

C'était une femelle. En s'approchant, il releva légèrement la queue, ses yeux vairons, oeil bleu à gauche et oeil ambré à droite, se fixant sur elle.

- Tu es sur la terre de la meute du Kohinoor dont je suis l'Alpha. Qui es-tu ?

Dragan n'avait pas encore l'automatisme permanent de chercher à l'odeur si c'était un nouveau réveillé ou un intrus.

Le vent continuait de balayer le sol d'un souffle puissant, s'engouffrant dans le Col en sifflant. Cosima secoua sa fourrure, histoire de la gonfler un peu pour se réchauffer. Des tonnes de questions se bousculaient dans sa tête. A commencer par : mais comment avait-elle pu atterrir là ? C'était tellement étrange. Parce qu'elle ne se souvenait pas de s'être déplacée, ni que quelqu'un l'ai bougée de quelques façons que ce soit. Elle s'en serait rendu compte quand même non ? Peut-être qu'elle était somnambule... Mais quand même, comment aurait-elle pu parcourir autant de distance en une nuit ? Ce paysage ne lui disait vraiment rien du tout. Elle n'en avait jamais entendu parler non plus. Elle tourna tout de même la tête dans tous les sens, l'air interrogatif, cherchant un point familier auquel se raccrocher. Peut-être qu'elle n'était pas si loin de chez elle après tout ? Comment pouvait-elle le savoir ...
Perdue dans ses pensée, Cosima ne s'était même pas rendue compte que quelqu'un avait répondu à son appel.

« Tu es sur la terre de la meute du Kohinoor dont je suis l'Alpha. Qui es-tu ? »

Elle sursauta, se retournant vivement vers la voix pour lui faire face. Ouvrant de grands yeux écarquillés par la surprise, elle le détailla quelques secondes, avant de seulement réfléchir à ce qu'il venait de dire.

« Euh... Bonjour. Je suis Cosima, et je dirais que.. Je suis perdue ? Le Kohinoor vous dites ? Je suis désolée d'empiéter sur vos terres... »

Elle lui offrit un sourire timide, gênée d'être dans une pareille situation. Se sentant ridicule, elle commença à se dandiner sur ses pattes. Les oreilles toujours baissées, elle affichait une attitude mi-neutre mi-soumise, se rendant tout de même compte qu'elle s'adressait à un Alpha et qu'il ne valait mieux pas s'en faire un ennemi. Le mâle semblait bien bâti, ayant une fourrure blanche épaisse comme elle. A la seule différence qu'il avait un regard vairon, caractéristique singulière. Cela lui donnait un certain charme, il fallait l'avouer. La femelle se sentait rassurée maintenant, parce que si elle était restée seule ... Il ne valait même pas mieux y penser. Mais la mort par la faim n'était pas inenvisageable, vu son niveau d'indépendance qui frôlait le ras des pâquerettes.

Il renifla et le vent qui tourbillonnait ne lui apporta aucune odeur particulière, et surtout, une odeur de "non-Sarkan" qu'il avait déjà sentie sur Shy, sur tous les nouveaux réveillés. Sa posture s'adoucit tandis qu'il l'écoutait parler au dessus du hurlement du vent.

- Je suis Dragan, enchanté ! Tu es arrivée sur Sarkan il y a peu, je suppose, vu ton odeur et le fait que tu sois paumée. Beaucoup de loups se réveillent ici sans savoir pourquoi et comment. Je suis né ici, mais ma mère était une louve éveillée, elle aussi.

Il lui pointa du museau un gros rocher qui luttait contre le vent et la neige, faisant comme un tremplin et préservant une petite zone moins battue par le vent, quoiqu'exiguë.

- Viens, on va aller parler là bas, on s'entendra mieux !

Dragan se mit à trottiner dans la neige épaisse tandis qu'il se dirigeait vers ce gros rocher aux reflets marrons et noirs, s'ébrouant une fois arrivé à l'abri, la neige valsant de chaque côté du rocher et au dessus mais pas dans la petite alcôve. C'était un endroit utile mais à éviter en cas d'avalanche.

Le vent jouait avec sa fourrure, la faisant virevolter dans tous les sens. Leurs voix se perdaient dans le hurlement de ce dernier, Cosima dû se concentrer pour comprendre tout ce que lui racontait Dragan... et ce qu'il dit ne la rassura pas beaucoup. Il sembla pourtant se radoucir, et elle se sentit un peu plus à l'aise. Il avait l'air de quelqu'un de sympathique à première vue.

« Enchantée aussi ! » et elle ne rajouta rien, suivant ce qu'il désignait du regard.

Cosima acquiesça avant de docilement le suivre, marchant dans ses traces. Elle fixait ses pattes qui soulevaient à chaque pas un peu de poudreuse, plissant les yeux et courbant l'échine pour lutter contre Éole qui ne semblait pas vouloir se calmer. Une fois arrivée elle se contenta de s'asseoir. Et elle ne put empêcher le flot de questions qui se précipitait dans sa tête de jaillir hors de sa bouche.

« Quand tu – ou vous ? - je ne sais pas, parles de se réveiller ici mystérieusement... Ça veut dire qu'il n'y a pas moyen de repartir d'où on vient ? » Ses yeux s'humidifièrent légèrement à le pensée de ne plus jamais revoir ses deux petits frères. Elle secoua la tête pour chasser cette idée désagréable. «  Parce que ... » Sa voix était encore légèrement tremblante. « J'ai une famille, là bas... Puis je ne saurais pas rester toute seule comme ça! » Ses oreilles étaient agitées de tics nerveux.  « Je ne suis pas faite pour être solitaire, et ça à l'air si grand ici, si vaste. Je vais me perdre... Je vais mourir. Je ne veux pas mourir, je suis trop jeune! Est-ce qu'il y a des gens qui ont réussi à repartir ? Comment je dois m'y prendre ?»

Elle parlait à toute allure, sans respirer ou presque. Cosima commençait à hyper ventiler, oh non. Ça n'était pas une bonne nouvelle, pas une bonne surprise. Mais pourquoi elle ? Elle repensa aux histoires qu'on contait aux enfants pour qu'ils s'endorment... Peut-être que c'était un rêve ?

« Je suis en train de rêver en fait, c'est ça ? Est-ce que tu es réel.. ? »

Elle se mit à renifler dans sa direction, l'air fou. Il fallait qu'elle le touche pour être sûre. Hésitante, elle laissa sa truffe le frôler légèrement. Et pour sûr, il n'y avait rien de plus réel. Une fourrure pleine de poils, tout doux. Ça chatouillait par contre, et elle se tourna vivement pour éternuer.

Dragan tenta plusieurs fois de répondre, mais elle était repartie, encore et encore. Donc il finit par fermer la gueule, l'écoutant afin d'être sûr de se souvenir de toutes ses questions. Mais elle finit par venir le toucher, pour vérifier qu'il était bien réel et Dragan se raidit un peu, étonné.

- Alors euh... Si j'ai bien compris, aucun loup n'a réussi à partir d'ici en le voulant, ou en priant à Mene. Je crois que les loups qui arrivent ici sont destinés à y rester... Et quant au fait de ne pas vouloir rester seule, eh bien...

Il tenta de secouer simplement sa tête pour s'éclaircir les idées.

- Eh bien, il y a trois meutes sur Sarkan, le nom de l'île où nous sommes. La meute du Kohinoor, dont je suis l'Alpha, qui se trouve dans la zone la plus haute et la plus froide de l'île. Tout en bas, la zone la plus chaude c'est Annalee. Et entre les deux, il y a la zone de la forêt, Iselwyn Sarkan. Et chaque zone a une meute du même nom.

Dragan offrit un sourire malicieux à la femelle.

- Le Kohinoor a encore quelques places, si tu veux.

... et donc ce n'était pas un rêve. C'était hallucinant, tout de même. Elle ne put s'empêcher de jeter un œil par dessus son épaule pour contempler l'endroit où elle s'était réveillée. Donc si elle avait bien compris, elle fait pop comme ça au milieu de nul part ? Elle prit une grande inspiration, tentant de calmer son angoisse. Et une autre. Et une autre. Finalement elle tourna la tête vers Dragan, faisant son possible pour se maîtriser.

« Alors euh... Si j'ai bien compris, aucun loup n'a réussi à partir d'ici en le voulant, ou en priant à Mene. Je crois que les loups qui arrivent ici sont destinés à y rester... Et quant au fait de ne pas vouloir rester seule, eh bien... »

Encore une mauvaise nouvelle, décidément. Personne n'avait réussi à revenir d'où il venait ! Génial, ça pour sûr c'est tout ce qu'elle avait besoin d'entendre. Un long frisson parcouru son échine, et elle ne put déterminer si c'était à cause du froid ou bien si c'était son corps qui protestait à sa manière. Probablement les deux. Le mâle secoua la tête et elle l'observa d'un air neutre. Enfin neutre, c'est du moins ce qu'elle tentait de laisser paraître. Parce que c'était bien les griffes acérées de la peur qui enserraient ses tripes à l'instant. Autant de mystère, ce n'était pas bon pour son petit cerveau. Puis qui était donc cette Mene ?

« Eh bien, il y a trois meutes sur Sarkan, le nom de l'île où nous sommes. La meute du Kohinoor, dont je suis l'Alpha, qui se trouve dans la zone la plus haute et la plus froide de l'île. Tout en bas, la zone la plus chaude c'est Annalee. Et entre les deux, il y a la zone de la forêt, Iselwyn Sarkan. Et chaque zone a une meute du même nom. »

Trois Meutes alors. Pour chaque zone. D'accord. La louve n'était pas sûre de que faire de cette information, mais elle tenta de l'enregistrer tout de même. Peut-être que l'une d'elle voudrait bien la prendre sous son aile.. ?

« Le Kohinoor a encore quelques places, si tu veux. » dit-il, un sourire malicieux aux lèvres.

Le soulagement se fit ressentir dans tout son corps, et elle répondit à son sourire avec un regard pétillant. Elle n'allait donc pas devoir errer seule par ici, dans le froid et sans aucun repère. Elle releva légèrement les oreilles, les pointant vers Dragan.

« Oh ! .. Ce-C'est.. Ce serait tel-tellement.. Gentil ! » Elle bafouillait maintenant génial. Elle ne pouvait donc pas rester normale plus de cinq secondes. « Tu voudrais donc bien de moi ? » La question sonnait bizarre en fait. « Je pourrais faire partie du Kohinoor ? »

Cette proposition tombait à pic, si c'en était bien une. Cela la remplirait de joie de faire partie d'une Meute, peu importe sous quel rang. Même si sa famille lui manquerait. De toute façon il valait mieux assurer son avenir immédiat, à savoir trouver des loups qui pourraient prendre soin d'elle mieux qu'elle ne le ferait elle-même, et ensuite elle verrait. Peu importe ce qu'il venait de lui dire à propos de la tournure définitive que prenait son arrivée ici, peut-être qu'il s'était trompé. Se dressant sur ses pattes, elle fut prise d'une énergie nouvelle. C'était plutôt positif tout ça, au final. Sa queue commença à s'agiter de droite à gauche, à la manière d'un chien. Il y avait quelque chose qui clochait chez Cosima, c'était indéniable.

Elle se tourna un peu de sorte à faire face à l'étendue neigeuse balayée par les rafales.

« Et donc cet endroit fait partie de ton territoire ? Est-ce qu'il est aussi grand que je ne le crois ? Parce que si nous sommes dans le Nord, comme dans mon ancien chez moi, ça promet d'être gigantesque. Je me souviens, la seule fois où j'en ai fait un tour complet, j'étais épuisée. Il y a beaucoup de montagnes ? Et une banquise ? Ou non ? C'est dangereux quand ça fond, ces machins là. C'est ce que tout le monde dit. »

Sa curiosité maladive reprenait le dessus, elle ne parvenait pas à arrêter de poser des questions, tout le temps.

« Désolée si je parle de trop ... » Souffla-t-elle.

Sourire timide, elle coucha une oreille contre son crâne. Ses yeux ambrés plongés dans les siens, toujours brillants. Elle avait tellement l'air d'une enfant, comme ça.

Cosima. C'était bien son nom, non ? Dragan avait eu beaucoup d'air dans les oreilles, résultat, il n'était pas sûr d'avoir bien compris. Mais il partirait du principe que c'était ça.

Elle était mignonne, en tout cas. Dans le sens, mignonne comme ses demi-soeurs... Enfin, il avait du mal à l'imaginer autrement à ce moment précis.

- Le Kohinoor se traverse en moins d'une journée. Là où nous sommes, c'est la zone la plus montagneuse. Quand tu descends par là, il pointa du museau dans un sens, tu as à la Kailash, notre rivière. Tout droit, tu as surtout la Taïga, une grande forêt. Et encore plus bas, il y a la steppe qui mène vers la Brèche, et Iselwyn. En gros, le territoire est plutôt pendu au niveau de la steppe et des montagnes, mais sinon ça va. On a pas de banquise, on est vraiment plus hauts que le niveau de la mer.

Il sourit alors à Cosima, plus largement qu'avant.

- Enfin, tu verras bien quand tu feras un tour. Mais j'aimerais que tu me parles un peu de toi, de ton ancienne place dans ta meute, tes compétences... Tout ça.

Une petite interview avant de la laisser vagabonder sur le Kohinoor.

« Le Kohinoor se traverse en moins d'une journée. Là où nous sommes, c'est la zone la plus montagneuse. Quand tu descends par là, il pointa du museau dans un sens, tu as à la Kailash, notre rivière. Tout droit, tu as surtout la Taïga, une grande forêt. Et encore plus bas, il y a la steppe qui mène vers la Brèche, et Iselwyn. En gros, le territoire est plutôt pendu au niveau de la steppe et des montagnes, mais sinon ça va. On a pas de banquise, on est vraiment plus hauts que le niveau de la mer. »

Cosima mit toute sa concentration disponible pour bien comprendre ce que disait Dragan. Plissant les yeux sous l'effort, elle tâcha de se dessiner une carte mentale. Elle esquissa un coup de crayon pour la rivière, un autre pour la Taïga puis tenta d'agencer tous les détails pour que ça ait une belle gueule générale. Ça rendait bien dans son crâne et elle sourit, satisfaite. Elle aimait déjà son nouveau chez soi, temporaire ou pas. La question restait en suspend dans son esprit. Même si y'avait pas de banquise. De toute façon, elle ne voulait pas risquer de se noyer. Sa mère l'avait assez mise en garde pour qu'elle évite de s'y rendre. Du coup si y'en avait pas, ça évitait les tentations et surtout, les risques inutiles.

Le mâle eu un nouveau sourire, plus large encore que les précédents. Cosima aimait beaucoup ce sourire, et elle dévoila presque ses canines, alors que les coins de sa gueule s'étiraient vers ses oreilles, l'imitant de façon exagérée. Elle n'y pouvait rien, mais elle absorbait toujours les émotions des autres, comme une éponge. C'est pour ça qu'elle ne supportait pas le malheur. Ça la faisait pleurer, et pleurer, ça n'avançait à rien. La vie était trop courte pour s'encombrer de ce genre de sentiments qui nous bouffaient de l'intérieur. Non, il fallait rire et profiter de chaque instant, c'était tout. Puis ça lui allait tellement bien à Dragan, elle avait presque envie de lui faire un câlin. On aurait dit un gros doudou !

« Enfin, tu verras bien quand tu feras un tour. Mais j'aimerais que tu me parles un peu de toi, de ton ancienne place dans ta meute, tes compétences... Tout ça. »

Là par contre ça lui plut moins, d'un coup. Elle émit un petit soupir qui sonnait comme une espèce de plainte contenue.

« De moi ? » souffla-t-elle, comme intégrant l'information.

Que pouvait-elle bien lui dire ? C'était pas comme s'il y avait foule trucs à raconter, sincèrement. Et pourtant. Elle ne pouvait décemment pas parler de sa fuite de la Meute, de sa mère à moitié barge et des autres loups qui la regardaient de travers. Le but c'était de se vendre, pas d'avoir l'air d'une merde. Comme à un entretien d'embauche.

« Y'a pas grand chose à dire. Je faisais partie de la Meute du Nord, ça ressemblait un peu à ici, sauf qu'on avait une banquise. » Elle y tenait, finalement. « J'avais presque fini mon entraînement ... Pas très brillant en fait. Enfin, je me débrouille à la chasse, j'suis même douée pour ça je dirais. Mais pour ce qui est du combat, je ne sais pas, j'ai pas le truc. Je me faisais ramasser sur la tronche à chaque fois. »

Combien de fois n'avait-elle pas fini en sang sur la piste d'entraînement ? C'était sa mère qui avait la charge de lui inculquer ça et pour tout dire elle n'y allait pas de main morte. Surtout sur la fin, avant que Cosima ne s'enfuie. Quand elle avait vraiment perdu la raison. Et personne n'osait protester quand elle rouait la louvette de coups, s'acharnant en répétant : Faut être prêt pour l'apocalypse ! Tu vas mourir si tu sais pas te battre ! Alors que c'était elle qui l'assassinait.
La femelle secoua la tête, chassant ses pensées. Sa mère ne devait pas penser à mal, sûrement qu'elle ne se rendait pas compte de ce qu'elle faisait. Elle ne ferait pas de mal à une mouche, de toute façon, non ?

« Voilà. » Dit-elle, ayant hâte de clôturer le sujet. « Je suis prise quand même ? Je pourrais essayer, si jamais c'est important de savoir se battre. Même si je ne promets rien. »

Elle baissa les oreilles, faisant des yeux de cocker.

La femelle avait l'air si... Jeune. Si innocente. Elle était un peu comme ses soeurs. Ou comme Crysta. C'étaient des louves qu'il appréciait de manière sincère, assez simple. En bref : Il voyait en elles pour l'instant des bébés. Des grandes louvettes. Cela l'empêchait d'être trop dans la séduction avec elles.

Il l'encouragea quand elle lui demanda si il parlait de ses qualités à elle. Chasseuse plus que combattante. Eh bien, cela lui allait plutôt bien. Les chasseurs étaient toujours utiles, et vu son gabarit, il ne doutait pas que faire le tank n'était pas trop dans ses cordes.

- Oui, bien sûr que tu es acceptée. Nous avons déjà plusieurs chasseurs, je pense qu'il faudra que tu trouves, à ton rythme, un autre rôle. Peut-être garder la tanière et la réserve propres. Tu verras. Apaiser les tensions, ce serait plutôt utile aussi, parfois.

Une omega, oui... Elle avait l'étoffe. Peut-être qu'elle prendrait naturellement cette place là auprès des autres.

« Oui, bien sûr que tu es acceptée. Nous avons déjà plusieurs chasseurs, je pense qu'il faudra que tu trouves, à ton rythme, un autre rôle. Peut-être garder la tanière et la réserve propres. Tu verras. Apaiser les tensions, ce serait plutôt utile aussi, parfois. »

Dés sa première phrase, Cosima s’était mise à battre de la queue frénétiquement, la joie l’inondant pleinement. Elle se sentait presque rayonner tellement ça l’enchantait. Enfin elle allait avoir sa chance d’être quelqu’un, non plus de souffrir en silence dans l’ombre de s amère. C’était fini, tout ça. A partir d’aujourd’hui elle serait la seule détentrice de son destin, point barre. Peu importe si elle était Oméga, Dragan aurait pu lui refiler un rang encore plus humiliant qu’elle s’en serait contre foutue quand même. C’était un nouveau départ, une chance inouïe qui lui était offerte. Elle en venait même à remettre en question son idée de trouver un moyen de rentrer chez elle. De toute façon, qu’est-ce qu’elle aurait bien pu faire là bas ? Rentrer chez sa mère la queue entre les pattes, persuadée de se faire saigner ? Non. Ca avait toujours été dans ses projets d’intégrer une Meute, de débuter ailleurs de toute façon. Elle enverrait des messages télépathiques d’adieux à ses frères, peut-être qu’ils les recevraient si elle y mettait assez de bonne volonté. Cosima changeait d'avis et d'humeur en claquement de doigt, ça faisait partie du personnage c'était pas nouveau.

La louvarde lui était tellement reconnaissante, elle eu envie de lui faire un gros câlin. Et, portée par l'euphorie du moment, c'est ce qu'elle fit. Se blotissant contre le poitrail du mâle pendant quelques secondes, elle souffla un : Merciii ! hystérique. Avant de se reculer vivement et de se mettre a gesticuler dans ce qui serait, semblait-il, une danse de la joie.

« Oh merci Dragan ! Tu viens de faire de moi la plus heureuse des louves sur terre. Je promets de faire de mon mieux, tu n’auras jamais à te plaindre de moi. Je serai irréprochable. »

Sourire colgate white now dans sa direction. Elle fit une petite pirouette avant de sauter en dehors de l’abri, la fourrure directement plaquée contre son corps à cause du vent. Rien à foutre, rien ne pouvait atténuer cet invincible sentiment d’euphorie qui la baignait toute entière. Qu’est ce qu’elle devait faire maintenant ? Elle n’avait toujours aucune idée de comment se repérer. Pourquoi ne pas simplement demander à si son généreux nouvel Alpha ?

« Alors qu’est ce que je dois faire maintenant ? C’est par où le camp ? » Regard à gauche, à droite, pariant sur les possibilités que ce soit en fait juste à l’opposé. « J’ai tellement, tellement, tellement hâte de rencontrer tout le monde. »

L'enthousiasme de la jeune louve était communicative et Dragan sourit en remuant légèrement la queue aussi. Apparemment, Cosima semblait bien partante pour intégrer rapidement et au mieux la meute du Kohinoor. Les gens enthousiastes portaient la meute. C'était absolument parfait.

- Suis-moi, je vais t'emmener à la tanière. Une fois là bas, je te laisserai faire la connaissance du monde pendant que je repartirai de mon côté. Il y a peu de temps, je suis devenu Alpha, ma mère était l'Alpha avant moi mais elle est... Elle est décédée.

Sa gorge se noua un peu, mais il se l'éclaircit avant de continuer.

- Dernièrement, il y a eu des louveteaux, enfin, aux dernières chaleurs il y en a eu. Mon frère Kunal et sa compagne ont eu trois louveteaux, en particulier, il m'aide dans la prise en charge du Kohinoor pour l'instant. Les Bêtas, Syliah et Sköll, sont des loups très bien. Les Gammas Eira et Croc Blanc aussi, tu trouveras rapidement tes marques j'en suis sûr.

Il tenta de lui offrir le sourire le plus rassurant possible. Cosima avait toutes les chances d'être intégrée aisément.

Sa queue battait la mesure, s'agitant en cadence pour signifier sa joie. Cosima commençait à voir mal aux zygomatiques à force de sourire comme une démente. Ses yeux ambrés pétillaient, allumés de cette éternelle lueur qui lui était propre.
Elle commença à acquiescer quand Dragan reprit la parole, faisant « oui oui oui » à toute allure. Elle était impatiente d'arriver dans le camp et de rencontrer les gens. Même si elle n'avait aucune idée de comment ils allaient réagir à son arrivée. Sympathiques, pas sympas, austères, méfiants, méprisants ? Il y avait tellement de possibilités, de cas de figures se présentant rien qu'à cet instant, plus qu'elle n'avait de coussinets pour compter. Mais son côté optimiste lui soufflait que tout allait bien se passer, comme d'habitude. Sa propension à faire confiance à l'avenir était inébranlable. Le destin lui crachait dessus depuis qu'elle était née mais jamais Cosima n'aurait pensé à se plaindre ou pire, remettre en question le futur. Diantre mais évidemment qu'il était joyeux et plein de bonnes choses ! C'était comme avec la météo. Des jours il pleuvait mais toujours le ciel reprenait cette couleur bleue pétante, éclairé par les rayons du soleil. C'était un bon exemple. La vie souriait et c'est en lui rendant la pareille que tout irait bien. De toute façon, à part avoir peur, elle ne connaissait aucun autre moyen d'approche que celui là. Le pessimisme lui restait inconnu.

Puis une ombra passe sur son visage lorsqu'il parla de sa mère décédée. Voilà qui était bien orageux. Baissant les oreilles, elle laissa sa queue lui tapoter l'épaule dans ce qui semblait être un geste rassurant.

« Je suis désolée pour toi. J'ai perdu mon père quand j'étais tout bébé alors je sais ce que ça fait. Mais je suis persuadée que tu fais un bon Alpha. » ajouta-t-elle avec un sourire.

Il n'y avait pas qu'en l'avenir que Cosima faisait confiance. Les loups bénéficiaient eux aussi de ce traitement. Pour elle tout le monde avait un bon fond. Ceux qui se montraient violent ou ronchon ou tout autre comportement déviant se cachaient en réalité parce que la vie les avait fait un peu trop morfler. Elle reconnaissait que certains n'avaient pas toujours eu facile. Et tout un chacun n'avait pas cette capacité de voir le bon côté des choses. Sa mission c'était de leur braquer une torche dans le visage pour qu'ils voient enfin la lumière, part tous les moyens possibles.

Dragan continua de parler, lui présentant quelques membres de la Meute à la volée. De ce qu'il en disait ça avait l'air de braves. Il semblait lui aussi optimiste quand à son arrivée, et la louve s'en trouve confortée dans ce qu'elle pensait. Elle était contente d'apprendre qu'il y avait des louveteaux, elle les aimait beaucoup ces petites boules de poils. Peut-être qu'elle pourrait aider les mères qui sait ?

« Ça à l'air génial tout ça. A ta place je serais fière aussi ! Ça doit faire plaisir de diriger une Meute d'aussi valeureux Guerriers et Guerrières. Tout doit donc bien se passer ? Enfin je verrai bien je suppose. J'espère aussi que je trouverai mes marques haha. Je n'ai encore jamais quitté ma Meute natale mais je suppose que ça fonctionne partout pareil. Même si j'appréhende un peu, sans mentir. »

La louvarde immaculée dégluti puis jeta un coup d’œil alentours, ayant de hâte d'y aller mine de rien. Elle ferma brièvement les yeux alors qu'une rafale lui cingla le visage. Même pas froid. Pensa-t-elle. En ce moment elle se sentait bien. Le passé était loin derrière elle et il n'y avait aucune raison que le désastre se répète. Elle serait aimée, cette fois. C'était ce qu'elle espérait plus que tout. Amour et bonheur.

Dragan acquiesça sans hésitation.

- Je suis fier, dit t-il à mi voix pour ne pas la couper pour autant.

Sa bonne humeur communicative faisait plaisir à Dragan. Il aimait avoir une louve aussi joyeuse "sous le coude". A vrai dire, le mâle espérait sincèrement qu'elle se plairait, car elle donnerait une dynamique positive à la meute dont cette dernière avait besoin. Les louveteaux, c'était bien beau, mais une femelle joviale, qui ne se prenait pas la tête, c'était ce qui cultivait l'idée de bien-être. Et des membres biens étaient une garantie de calme et de loyauté. Il l'espérait.

- Je ne doute pas une seule seconde que tu trouveras ta place. Les gens gentils en ont toujours une, de toute façon.

Dragan se mit donc en route en trottinant vers la tanière sans hésiter. Il pensait bien qu'elle le suivrait de toute façon et qu'elle aurait hâte de commencer sa nouvelle vie, de rompre l'angoisse de l'inconnu. De commencer à faire du Kohinoor sa famille. Dragan se demanda si il aurait trouvé ça aisé de changer du jour au lendemain d'endroit et se dit qu'il devait être très difficile d'être à la place de ces éveillés.